Clairvivre. Une ville de clarté, de travail et de gaité
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A l'occasion de la publication de l'ouvrage Clairvivre. Une ville de clarté, de travail et de gaité, une rencontre entre les co-auteurs Yveline Loiseur (photographe) et Jean-Philippe Pierron (philosophe), animée par Valérie Disdier (Cité Anthropocène).
Enregistré en public au sein de l'exposition Les formes de l’attention d'Yveline Loiseur à la Galerie Françoise Besson (Lyon), le 19 décembre 2024.
Ne faudrait-il pas repenser notre rapport au monde à partir de notre vulnérabilité commune ? Retrouver le sens de l'action à partir du geste du soin et de la réparation ? La photographie peut-elle relever d'un tel geste ?
"Initialement destinée à accueillir les soldats blessés du poumon pendant la Première Guerre Mondiale et leurs familles, la cité sanitaire de Clairvivre est devenue sanatorium et abrite aujourd’hui différentes structures d’aide, de formation et de vie en direction des personnes en situation de handicap. (...) Yveline Loiseur a été séduite par la beauté du site, la mémoire des lieux, ainsi que par l’attention portée au handicap; tout ce qui constitue sa démarche artistique s’y trouve réuni: la vie collective; la question du soin; l’architecture et la manière dont on l’habite; la possibilité d’une relation avec ces autres êtres vivants qui constituent ce qu’on appelle la nature, plantes, arbres, ciel et terre. " (présentation du livre sur le site des Éditions deux-cent-cinq)
Extraits de la rencontre :
« Les ombres portées des arbres sur les bâtiments sont une sorte de souvenir des radios des ramifications des poumons. » Yveline Loiseur
« C'est peut-être ça, ce qu'on appelle l'anthropocène, c'est croire qu'on peut coordonner à l'échelle planétaire une temporalité qui fonctionne tout le temps. Celle qui fait que pendant que je dors, je vais recevoir des mails ou qu'on va continuer de vendre et d'acheter en bourse. (...) Mais cette temporalité là, c'est une temporalité hors sol - paradoxalement, ou hors temps. C'est ce qu'on appelle le temps réel, du temps de la machine ou de la méga-machine, c'est un temps sans rythme. Et d'une certaine façon, le travail, d'Yveline Loiseur, c'est une espèce d'oasis, une structure flottante. On sait pas où c'est, enfin - on sait où c'est, mais on sait pas quand c'est. (...) Parce que précisément, la question du "quand c'est ?", c'est une temporalité qui ralentit, qui réinstalle des histoires de vie qui sont aussi des histoires blessées (...). » Jean-Philippe Pierron
« Le travail d'Yveline Loiseur, c'est de rappeler que la vulnérabilité, c'est quelque chose que nous avons en partage. On aimerait bien que les vulnérables, ce soient les autres. On ne veut pas l'être, on n'a pas du tout envie d'être vulnérables. Et en même temps, quand on l'oublie, on fabrique des horreurs. » Jean-Philippe Pierron
« Dans les usagés sociaux que nous en faisons, la vulnérabilité est une catégorie épistémologique qui sert à classer les personnes pour dire dans quel dispositif on va les mettre. (...) On fait ça pour les personnes âgées, on fait ça pour les enfants, on fait ça pour les personnes en sans emploi, on fait ça pour les personnes incarcérées... Enfin bref, la catégorie des vulnérables, c'est une catégorie qui consiste à dire "c'est quelqu'un qui n'arrive pas à se tenir dans le monde tel qu'on a fabriqué." Un monde dont on pense que pour se tenir, il faut se faire tout seul. Mais c'est une conception de l'autonomie exaltée. [Qui s'oppose à la] conception relationnelle d'autonomie qui consiste à dire "être un sujet, c'est être un sujet conscient de tous les liens qui font être. C'est ça être vulnérable, donc là vulnérabilité non pas comme un défaut, mais comme une ouverture au lien. » Jean-Philippe Pierron
« Je ne photographie jamais des personnes que je ne connais pas et qui ne me connaîtraient pas, donc [il y a] une réciprocité de relation, c'est beaucoup de de temps de discussion, de conversations, de partage. » Yveline Loiseur
« Je travaille en argentique sur pied avec des films et donc l'appareil photo est en face de la personne et on est, on est dans un dans, dans dans une égalité. C'est quelque chose auquel je suis extrêmement attachée. (...) August Sander disait partager avec ses modèles la fabrication de l'image, c'est à dire qu'on est dans une sorte d'autoportrait assisté. » Yveline Loiseur
Clairvivre. Une ville de clarté, de travail et de gaité
Collection “À partir de l’Anthropocène”
Coédition Éditions deux-cent-cinq et Cité Anthropocène
Auteurs.rice: Yveline Loiseur, photographe; Jean-Philippe Pierron, philosophe; Raphaëlle Saint-Pierre, historienne de l’architecture
Vous pouvez consulter la fiche détaillée et vous procurer l'ouvrage sur le site des Éditions deux-cent-cinq.
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